La montée royale

Un dieu dégage une telle puissance qu'il faut être initié, accepté, reconnu pour pouvoir l'approcher.
Cette initiation est rappelée dans les temples, sous la forme d'un ensemble de scènes formant la "montée royale", afin que le pharaon, ou le prêtre le représentant, puisse accomplir le culte journalier.

Comme toujours, l'iconographie égyptienne combine plusieurs niveaux d'interprétation:
- Ces scènes remplies de divinités peuvent aussi se lire à un niveau très prosaique, proche de la réalité, décrivant les actions réellement effectuées par le pharaon.
- Elles sont en partie identiques aux rites permettant le couronnement d'un nouveau roi, après l'enterrement du précédent.
- Enfin, elles sont aussi utilisées dans le contexte des temples jubilaires ou funéraires, dédiés à la fonction royale et non pas à un dieu.

Le culte étant rendu plusieurs fois par jour, pour des raisons pratiques, les officiants passaient par des portes latérales plutôt que par l'entrée principale entre les môles des pylônes. On trouvera le plus souvent cette montée royale sur le trajet des officiants, sur des murs ou des couloirs latéraux.
 

Première scène, le roi sort du palais, accompagné par des enseignes.
Un prêtre sem purifie le chemin avec de l'encens.
Philae
Dendera
La similitude est frappante.
Dans les 2 cas, la partie droite de la photographie, avec Thot, montre le début de la deuxième scène de montée royale, que nous aborderons un peu plus tard.
Esna
Philae
Le roi et les enseignes.
 Esna
Voici le palais.
Prosaiquement, le roi doit en effet sortir de son palais pour se rendre au temple cultuel.
Dans le cadre du couronnement, ce "palais" pourrait être une salle du temple où le prétendant au trône s'est recueilli.

Revenons à l'objectif de la montée royale : préparer le roi au grand moment, la rencontre avec la divinité à qui le lieu est consacré.
Pour cela, le roi va être successivement accueilli par des divinités "secondaires", afin de signifier qu'il est accepté parmi les dieux.
Entendons-nous bien, ces divinités ne sont secondaires que dans le cadre de la montée royale et quand un temple n'est pas le leur.
Elles retrouvent le rôle principal quand elles sont chez elles.
 

Deuxième scène, purification du roi par Horus et Thot.

L'eau se transforme en signes Ankh et Ouas. 
Symboliquement, il existe 2 Nils, auxquels Thot et Horus sont respectivement associés. 
Ces 2 Nils fusionnent grâce à l'eau de l'inondation.
Thot particulièrement aide l'arrivée de la crue (mythe de la lointaine). 
La gestion de l'inondation est une des fonctions majeures du roi, car une bonne gestion permet de conserver l'unité du pays.
Kalabsha
 

Ici, l'allusion au double pays maintenu uni est constante : Thot, l'uraeus à couronne blanche et le vautour (Nekhbet) pour la Haute Egypte, Horus, l'uraeus à couronne rouge et ... un autre vautour, en lieu et place de l'habituel cobra (Ouadjet) pour la Basse Egypte. 
Abydos
Amada
Au-delà de la simple purification probablement réellement pratiquée par le roi (ici Amenhotep II) avec l'aide d'assistants jouant le rôle d'Horus et Thot, cette scène a donc pour objet de renforcer la fonction royale.
Esna
Thot et Harsiesis officient sous l'oeil de Menhit.
Troisième scène, Nekhbet et Ouadjet couronnent le pharaon. 
Très prosaiquement, le roi revêt ses habits et accessoires de culte.
Dendera
Edfou
Plus symboliquement, le contact des mains permet le passage de l'influx divin.
Sur cette scène particulièrement, les veines dilatées des seins suggèrent un allaitement.
Or l'allaitement par une déesse est aussi une manière de donner une parcelle de divin au roi.
Quatrième et dernière scène, Atoum et Montou emmènent le roi vers le dieu principal du temple. 
Pourquoi Atoum et Montou ? 
Parce qu'Atoum est le dieu d'Héliopolis et Montou celui d'Hermonthis (Armant à coté de Louxor), l'"Héliopolis du Sud".
Une nouvelle fois, 2 symboles de la Haute et de la Basse Egypte. 
Ramesseum
Karnak, chapelle blanche Une variante, Montou et Atoum sont sur 2 scènes distinctes.
Voici probablement Atoum.
Atoum est un démiurge, un dieu créateur, un dieu qui donne la vie.
Montou est un dieu des armes, qui possède l'agressivité nécessaire pour protéger la vie.
Ankh et Ouas...
Une autre variante, Oupouaout du Sud et "Horus qui réside à Abydos" remplacent Atoum et Montou.
Hathor de Denderah fait la révérence NyNy en son honneur. 
Abydos
Une dernière variante.
Horus fils d'Isis et Atoum accompagnent le roi.
Dans ces 2 dernières scènes, nous sommes probablement dans un contexte plus jubilaire que cultuel.
Derr

A la fin de la montée royale, le roi est prêt à rencontrer le dieu à qui le temple est consacré.


 
 
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